L'aventure
coloniale
fait partie intégrante de la France de la belle-époque.
En effet, hormis l'Algèrie, conquise en 1830 pour mettre fin
à la piraterie barbaresque (ce qui a permis de libérer
les quelques centaines d'esclaves restant suite aux différentes
opérations des grandes puissances, il y en avait 30.000 à
la grande époque), l'empire colonial s'est constitué
aprés 1870, sous l'impulsion du ministère Jules Ferry,
particulièrement entre les années 1880 et 1900. Or
force
est de constater que l'idée
coloniale a du lutter pour s'imposer face aux anti-colonistes, et que
les partisans de l'expansion coloniale étaient des
républicains modérés. Leur argument était
économique (nécessité de débouchés
hors d'une Europe saturée), humanitaire (fardeau de l'homme
blanc, responsabilité des races supérieures de civiliser
les races inférieures), et nationaliste (la France devant garder
son rang à la tête des peuples civilisés). Leurs
adversaires, plutôt de droite (cf. Paul Déroulède), mais pas seulement (e.g. le radical Georges Clémenceau), rétorquaient que l'empire coutait
cher, et qu'il valait mieux penser à la revanche (ligne bleue
des Vosges, seul horizon légitime).
L'opinion finit par admettre le fait colonial, par
indifférence ou parce qu'on y voyait les avantages cités
plus haut.
Commandée par de grands chefs militaires,
comme Lyautey au Maroc, Gallièni et Joffre au Tonkin et à
Madagascar, Mangin en Afrique noire, l'armée s'engage dans la
conquête des territoires en s'appuyant sur sa puissance
militaire.
Puis Aprés la pacification le système administratif
français se met en place, accompagné de
commerçants et d'industriels soutenus par le parti colonial.
L'aspect culturel et la référence à la mère
patrie sont naturellement encouragés par les gouvernements
d'alors, qui facilitent aussi une action missionnaire importante
grâce aux différents ordres religieux catholiques (alors
qu'en France l'anticléricalisme était de rigueur!).
Père Charles de Foucauld, religieux à Tamanrasset (1858-1916):

D'une importance croissante, un conseil
supérieur des colonies fut créé en 1883, suivi par
une école coloniale en 1889 et enfin un ministère des
colonies en 1894.
Le statut des colonies varie bien sur
énormément suivant leur date de conquête, leur
régime politique antérieur, leur intérêt
économique, si la population est calme ou se soulève,
etc. On peut avoir de vrais territoires français (Martinique,
Guadeloupe, Guyane, etc.) qui bénéficie de la doctrine de
l'assimilation, et dont les habitants sont citoyens français
depuis 1848. L'algèrie est divisée en trois
département français avec un gouverneur
général. Dans ce cas précis c'est l'opposition
radicale loi française/ loi coranique qui finalement fera que la
tentative d'assimilation ne marchera pas, bien que l'Algèrie
française ait été une grande réussite (en
1962 ce pays était le plus moderne d'Afrique aprés
l'Afrique du sud). D'un autre coté on a des colonies ou des protectorats (Maroc, Tunisie),
En 1914 la France a le deuxième empire colonial du monde avec 10 millions de kilomètres carrés.
Tunisie: L'intervention en
Tunisie est décidée en 1880, encouragée par
l'Angleterre (qui lorgne sur l'Egypte) et Bismarck (pour
éloigner les français de l'idée de revanche).
L'expédition aboutit au traité de Bardo (mai 1881), dans
lequel le Bey reconnait la présence militaire française.
Il faudra néanmoins plusieurs mois pour la pacification.
Maroc:
L'intervention au Maroc est beaucoup plus problématique car elle
se heurte à la politique du Kaiser. L'Allemagne est en effet
à son tour entraînée dans l'aventure coloniale. Le
ministre des affaires étrangères Delcassé avait
obtenu l'aval des britanniques pour les entreprises françaises
au Maroc, contre quoi était reconnue à la Grande-Bretagne
la main-mise sur l'Egypte. Mais en mars 1905 un discours retentissant
prononcé à Tanger par Guillaume II, qui se pose en
protecteur du Maroc déclenche une grave crise internationale.
Celle-ci ne finira qu'avec la conférence d'Algésiras,
où la France eut les moyens de pression suffisant sur le sultan
du Maroc, ayant eu le soutien de la Russie, de la Grande-Bretagne, de
l'Italie et des Etats-unis.
Une nouvelle crise a lieu en 1911 lorsqu'un navire
de guerre allemand est envoyé dans le port d'Agadir en vue
d'obtenir une compensation à la pénétration
française au Maroc. La diplomatie britannique encourage la
France à un arrangement avec l'Allemagne. Dans un premier temps
les allemands exigent la cession le Congo français, puis
finalement on leur donne la partie intérieure du Congo
français, entre le Cameroun et le Congo belge, plus une bande de
terre offrant un accés à la mer au territoire, au sud de
la colonie espagnole de guinée.
Le protectorat est proclamé en mai 1912, et
le général Lyautey, premier résident
général, est chargé de pacifier et d'administrer
le pays.
La légion étrangère en action au Maroc - Le petit journal 5 octobre 1907

Le sultan du Maroc:

Indochine:
L'expédition en indochine a pour but de
créer un accés au marché chinois. La France
imposent dabord son protectorat sur la Cochinchine et le Cambodge,
puis s'emparent du Tonkin et de l'annam (traité de Tien-Tsin de
juin 1885), et finalement du Laos en 1893. L'union indochinoise est
créée en 1887 pour regrouper les différents territoires conquis depuis
1858. Elle regroupait quatre protectorats, Cambodge, Laos, Annam,
Tonkin, et une colonie, la Cochinchine. Le pouvoir était exercé par un
gouverneur siégeant à Hanoï.
Madagascar: La main-mise sur Madagascar a lieu elle aussi dans
les années 1880. En 1885 la reine Ranavalona III
concéde des avantages aux français, dont le controle du
port de Diégo-Suarez. En 1895 a lieu l'expédition
française aboutissant à la reconnaissance du protectorat
français sur Tananarive. La pacification de l'île est
confiée à Galliéni.

Manifestation patriotique pour le départ du 200° pour Madagascar - Le petit journal Dimanche 24 mars 1895:

Afrique noire: En Afrique Noire la France posséde
déjà, au début des années 1880, le
Sénégal ainsi qu'un certain nombre de comptoirs en
Guinée et en Côte d'Ivoire. La pénétration en
Afrique occidentale se fait contre des troupes indigénes
divisées entre-elles et luttant aussi contre les britanniques.
En Afrique équatoriale la pénétration commence
avec les expéditions de Savorgnan de Brazza qui aboutissent
à former le noyau de la future Afrique équatoriale
française.
Les années suivantes voient la conquête
continuer et se constituer l'Afrique Occidentale française (AOF)
en 1895 et l'Afrique Equatoriale Française (AEF) en 1908, tandis
que
le controle du Sahara permet de relier l'Afrique noire à
l'Afrique du nord. L'AOF regroupait le Sénégal, le Soudan
français (Mali et Burkina actuels), la Guinée, la
Côte d'Ivoire, le Dahomey (Bénin actuel), le Niger et la
Mauritanie, sous la houlette d'un gouvernement général
à Dakar. L'AEF regroupait le Gabon, le Moyen-Congo
(république populaire du Congo actuel), l'Oubangi-Chari
(république de Centrafrique actuel) et le Tchad, avec pour
capitale fédérale Brazzaville.
Savorgnan de Brazza, explore le congo en 1875, puis organise cette colonie entre 1886 et 1898:

Le
colonel Marchand dans la forêt vierge durant la mission Congo-Nil
vers 1898 - Supplément illustré du petit journal (à gauche) - Dans le monde moderne 1899 (à droite

Le commandant Marchand - Le monde moderne 1899

Le drapeau français flotte sur Tombouctou - Supplément illustré du petit journal février 1894

Carte
de l'Afrique d'aprés la convention franco-anglaise -
supplément illustré du petit journal Dimanche 9 avril
1899:

Affiche de 1900 célébrant la colonisation française:

Source: La belle époque - Michel Winock - Tempus - 2003
Les soldats des colonies - Chantal Antier-Renaud - Christian Le Corre - Ouest France - 2008