LA LANGUE FRANÇAISE

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Ce qui n’est pas clair n’est pas français - Rivarol - De l’universalité de la langue française - 1783

Les langues passent et se dégradent en suivant le déclin des empires - Rivarol - De l’universalité de la langue française - 1783

Le français bien parlé ne chante pas. C’est un discours de registre peu étendu ; une parole presque plane. Nos consonnes sont toutes remarquablement adoucies. Quant à nos voyelles, elles sont plus nombreuses et plus nuancées que dans les langues latines ou germaniques. L’e muet nous est une ressource particulière en poésie.

Je ne parlerai pas de notre orthographe, malheureusement fixée, en toute ignorance et absurdité, par les pédants du xviie siècle, et qui n’a pas laissé depuis lors de désespérer l’étranger et de vicier la prononciation d’une quantité de nos mots. Sa bizarrerie en a fait un moyen d’épreuve sociale : celui qui écrit comme il prononce est, en France, considéré inférieur à celui qui écrit comme on ne prononce pas.

Notre syntaxe est des plus rigides. Elle s’égale, quant à la rigueur des conventions, à notre prosodie classique. Il est remarquable qu’un peuple dont l’esprit passe pour excessivement libre et logique se soit astreint dans son parler à des contraintes dont beaucoup sont inexplicables. Peut-être les Français ont-ils senti qu’il existe une liberté d’ordre supérieur qui se révèle et s’acquiert par le détour des gênes, même tout inutiles.

Quoi qu’il en soit notre langue, rebelle aux formations des mots composés, aux facilités d’accord, au placement arbitraire des mots dans la phrase, et se contentant volontiers d’un vocabulaire assez restreint, est justement fameuse pour la clarté de sa structure qui, jointe à un goût fréquent chez nous des définitions et des précisions abstraites, fit concevoir et réaliser tant des chefs-d’œuvre d’organisation verbale – des pages d’une perfection d’architecture telle qu’elles semblent exister et s’imposer indépendamment de leur sens, des images ou des idées qu’elles portent, et même de leurs vertus sonores ; comparables qu’elles sont, sous ce jour, à ces pièces de savante musique dont le thème est peu de chose, et le plaisir immédiat qu’elles donnent à l’oreille presque négligeable, au prix de la sensation intellectuelle qu’on en reçoit et de la jouissance supérieure de comprendre cette même sensation - Paul Valéry - Regards sur le monde actuel - Pensée et art français

Le français est bien séparé des autres langues, non seulement par le vocabulaire, mais par sa diction, mais par la rigueur et la complication des régles de l'orthographe et de la syntaxe ; mais par une remarquable tendance à n'employer qu'un petit nombre de mots - à quoi nous trouvons de l'élégance et je ne sais quel air universel - Paul Valéry - Regards sur le monde actuel - Coup d'oeil sur les lettres françaises

"...Le vrai seul est aimable..." - C'est de là que proviennent les lacunes de la France, son refus du Flou et du Fumeux, son anti-poésie, son anti-métaphysique. Plus encore que Descartes, Boileau devait peser sur tout un peuple et en censurer le génie - Emil Cioran - Syllogismes de l'amertume


Langues régionales:

Les gouvernements ignorent, ou ne sentent pas assez, combien l'anéantissement des patois importe à l'expansion des lumières, à la connaissance épurée de la religion, à l'exécution facile des lois, au bonheur national et à la tranquilité publique - abbé Grégoire - Conventionnel et chef de l'Eglise constitutionnelle

Nos ennemis avaient fait de la langue française la langue des cours; ils l'avaient avilie. C'est à nous d'en faire la langue des peuples... Le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton, l'émigration et la haine de la république parlent allemand, la contre-révolution parle italien et le fanatisme parle le basque. Brisons ces instruments de dommage et d'erreurs - Barrère - rapport à la convention - 28 février 1794

Pour se moquer des bretons, les francophones formèrent d'ailleurs baragouin et baragouiner du breton bara (pain) et gwin (vin).